Contre la PEC du banditisme et contre l’amnistie : Luttes des masses et organisation populaire
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Contre la PEC du banditisme et contre l’amnistie : Luttes des masses et organisation populaire

Pourquoi seule l’organisation populaire peut vaincre la PEC « pour se blinder et celle qui vise à amnistier pour les putschistes

Juca Batista Lopes 30 set 2025, 10:18

La PEC «da blindagem », aussi appelée PEC du banditisme[1], n’est pas seulement un projet de loi parmi d’autres au Congrès. Elle vise à institutionnaliser l’impunité, en protégeant les politiciens corrompus et en garantissant la survie politique des secteurs autoritaires. Dans le même temps, la Chambre des députés examine actuellement une tentative d’approuver une amnistie générale pour les crimes du bolsonarisme, y compris les attaques putschistes du 8 janvier, ainsi que des propositions visant à modifier les décisions déjà prises par la Cour suprême fédérale. Plus que de simples manœuvres parlementaires, ces projets représentent la convergence des intérêts du bolsonarisme, du centrage et d’une partie de la vieille politique, qui tentent de normaliser ce qui est inacceptable pour la démocratie.

La bonne nouvelle est que la CCJ (Commission de Constitution et Justice) du Sénat a unanimement rejeté la PEC da Blindagem, l’empêchant ainsi d’avancer au Congrès. L’amnistie générale se heurte également à une résistance de plus en plus forte et, sous la pression continue de la société, il est peu probable qu’elle soit approuvée. Ces victoires partielles de la mobilisation populaire démontrent que la lutte organisée fait la différence et que la société peut freiner les projets qui menacent la démocratie.

La gravité de la PEC da Bandidagem et de la proposition d’amnistie doit être comprise dans le contexte d’une avancée mondiale de l’extrême droite. Au cours de la dernière décennie, nous avons été témoins de mobilisations massives qui ont démontré la force populaire et la capacité de résistance contre les politiques autoritaires, les politiques d’austérité qui suppriment les droits et aggravent les inégalités. Aux États-Unis, par exemple, il y a eu des manifestations gigantesques contre le racisme structurel et les mesures régressives, mais il n’en reste pas moins que Donald Trump a été réélu l’année dernière, consolidant ainsi une base sociale qui menace encore aujourd’hui la démocratie du pays. En Europe, nous avons également assisté à de grandes manifestations populaires, mais, en parallèle, l’extrême droite a progressé dans des gouvernements comme ceux de la France, de l’Allemagne et de l’Italie, souvent soutenue par des discours nationalistes et l’application de politiques d’austérité qui pénalisent les travailleurs. Ces exemples montrent que la lutte ne peut s’arrêter et que la résistance isolée, sans orientation politique stratégique, ne suffit pas à contenir sa progression de l’extrême droite. Ce retour sur le passé renforce la nécessité d’une réaction organisée, articulée et permanente, qui transforme l’indignation en mobilisation concrète, en associant la lutte démocratique à la lutte sociale et de classe.

Au Brésil, on peut identifier des schémas similaires. En 2013, des millions de personnes sont descendues dans la rue pour protester contre la précarisation de la vie et pour l’amélioration des services publics. L’absence d’une direction politique de gauche capable de canaliser ces mobilisations vers des alternatives structurées a permis à des secteurs d’extrême droite de coopter une partie du mouvement et de se renforcer politiquement. Il est important de souligner que les secteurs de gauche qui ont su se positionner et se battre à ce moment-là, comme le PSOL, ont grandi et consolidé leur influence. Dans le même temps, il est essentiel de souligner que ces mouvements ne peuvent être récupérés par des opportunistes électoralistes; la lutte populaire doit conserver son autonomie et sa cohérence stratégique. Aujourd’hui, face à la PEC da Bandidagem et à la proposition d’amnistie, cette expérience historique renforce la nécessité d’organiser les masses et de mettre en avant des orientations stratégiques pour que le mécontentement populaire ne soit pas récupéré par des forces autoritaires.

Un aspect important de la résistance contemporaine est le potentiel de mobilisation des travailleurs les plus précaires, tels que les travailleurs des applications et ceux soumis à la «pejotização»[2]. Bien qu’ils n’aient pas encore de tradition d’organisation collective et que bon nombre de leurs mouvements récents aient surgi de manière spontanée ou aient même été partiellement cooptés par les plateformes elles-mêmes, ils expriment clairement leur mécontentement face aux conditions d’exploitation et de précarité auxquelles ils sont confrontés. Une partie de ces travailleurs, d’ailleurs, reste sympathisante du bolsonarisme, mais ne manque pas de percevoir comment le système les opprime. C’est un défi stratégique pour la gauche d’intégrer cette partie de la classe ouvrière aux luttes populaires, en reliant leurs revendications à la mobilisation des masses, en montrant qu’il est possible de transformer l’indignation individuelle en action collective et d’amplifier la force sociale contre l’extrême droite et l’impunité.

Il faut noter que l’extrême droite ou le centre ne sont pas les uniques responsables de l’avancée de cette PEC da Bandidagem. Malheureusement, certains secteurs de la gauche dite institutionnelle, y compris certains parlementaires du PT, ont fini par céder à la logique de la conciliation ou du clientélisme, votant en faveur de la PEC à certains moments. Cette attitude renforce la nécessité que l’organisation populaire et la mobilisation des masses soient le véritable moteur du changement, plutôt que de se fier exclusivement aux instances institutionnelles.

Heureusement, la pression de la société, ajoutée à la mobilisation dans les rues, a montré sa force en bloquant partiellement la PEC et en rendant difficile l’approbation de l’amnistie.

C’est pourquoi les manifestations contre la PEC de la protection et la PEC de l’amnistie révèlent une dynamique spécifique de la mobilisation contemporaine. Contrairement à d’autres époques, les syndicats et les mouvements étudiants brésiliens sont confrontés à une crise profonde et, dans une large mesure, n’ont pas réussi à susciter de grandes mobilisations. De même, les partis dits du centre démocratique et de la gauche traditionnelle ont lancé des appels relativement timides, sans parvenir à occuper le devant de la scène politique. Dans ce contexte, le rôle des artistes et des influenceurs numériques a été décisif : ce sont eux qui ont mené, diffusé et coordonné une grande partie des manifestations, en particulier via les réseaux sociaux. Il faut toutefois reconnaître que ces plateformes numériques ne sont pas neutres : elles ont leurs propres positions et intérêts, et nous ne pouvons pas compter uniquement sur elles pour organiser la lutte. Le défi stratégique de la gauche est de profiter de ce moment pour percer la bulle numérique, se donner les moyens de mobiliser et d’organiser les gens au-delà de l’appel virtuel, et transformer l’élan spontané en action collective structurée. C’est l’occasion de montrer que la force de la rue se trouve renforcée lorsque les secteurs populaires, artistiques, numériques et précaires se connectent à une organisation consciente et stratégique, capable de susciter une mobilisation réelle et durable.

Du point de vue marxiste, les transformations décisives ne naissent pas dans les bureaux, mais dans la force vive des masses en mouvement. Rosa Luxemburg rappelait que la démocratie se consolide dans l’action populaire ; Trotsky avertissait que c’est dans les moments de crise que se définit si la classe ouvrière prend la direction ou si la réaction avance. C’est dans la rue, avec une organisation et une conscience stratégique, que se construit le pouvoir social capable de transformer l’indignation en avancées concrètes, vers des changements structurels et l’émancipation collective.

L’extrême droite a du encaisser ces défaites partielles comme le blocage de la PEC da Blindagem et la résistance à l’amnistie et son projet autoritaire n’est pas invincible. Mais la classe ouvrière et la jeunesse, si elles s’organisent, peuvent transformer ces moments en nouvelles opportunités de mobilisation, ouvrant une étape de résistance encore plus stratégique et replaçant la gauche en position de force et d’initiative. La tâche est difficile, mais pleine de possibilités : assemblées populaires hybrides, comités de lutte, plénières syndicales connectées à des plateformes numériques alternatives, actes culturels et performatifs, occupations symboliques, interventions urbaines et référendums populaires, comme la taxation des grandes fortunes et la lutte contre l’échelle 6×1[six jours travaillés pour un jour de repos par semaine], sont autant de moyens de mobiliser, d’engager et d’enthousiasmer de nouvelles couches de la population. En même temps, il faut accorder une place centrale à la lutte des minorités, telles que le mouvement noir, les femmes, la communauté LGBT+ et d’autres secteurs historiquement opprimés, car sans eux, il n’y a ni résistance efficace ni projet émancipateur.

Parallèlement, la lutte environnementale, pour l’écosocialisme et la souveraineté populaire, élargit cette mobilisation en reliant les zones urbaines et rurales, la défense des territoires, la réforme agraire, les territoires des peuples autochtones et la durabilité à la justice sociale. C’est dans l’articulation entre la lutte environnementale, les droits sociaux, la terre et la souveraineté que se construit une perspective transformatrice de gauche, capable de relier l’indignation populaire à l’action collective, de mobiliser les travailleurs, les jeunes, les mouvements sociaux et les minorités, et d’avancer dans la construction d’un projet émancipateur et solidaire pour toute la société.

Le moment exige de la compréhension, de l’organisation et du courage. Les manifestations contre la PEC de la Bandidagem et de l’Amnistie, et les victoires partielles remportées, montrent que la pression populaire est capable de bloquer les projets autoritaires et de transformer le paysage politique. Il est temps de descendre dans la rue et de dire, avec la force collective de millions de personnes : Pas de protection pour les putschistes, pas d’amnistie pour les corrompus et pas de soumission à l’impérialisme de Trump. L’avenir se gagnera par la lutte, l’organisation et le socialisme.


[1] La PEC da Blindagem, Projet d‘Amendement à la Constitution «pour se blinder» a été taillée sur mesure pour garantir une large immunité judiciaire aux parlementaires brésiliens, qui ne pourront être l’objet d’enquête judiciaire qu’après autorisation de l’assemblée. L’enjeu est d’importance puisque plus d’un tiers des parlementaires sont aujourd’hui l’objet de poursuites pour des faits qui vont de la participation à la tentative de putsch bolsonariste à des délits de droit commun á l’association avec le grand banditisme et le trafic de drogue, en passant bien sûr par la corruption et le détournement de fonds publics. C’est pourquoi cette PEC est aussi appelée PEC du banditisme (NdT).

[2] La précarisation fait que nombre de travailleurs sont amenés à se déclarer entrepreneur individuel ou constituer un statut de micro-entreprise. Ils deviennent ainsi une PJ (prononcé Pe Jota en portugais), une personne judiciaire ou morale (NdT).


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