Éditorial: Organiser les revendications du mouvement de solidarité face à la tragédie qui frappe le Rio Grande do Sul
Pour répondre concrètement à la crise, il faut construire un large mouvement et organiser la lutte autour des besoins urgents de l’État.
La tragédie du Rio Grande do Sul (RS) occupe une place centrale dans la situation nationale, tous les efforts sont concentrés sur le sauvetage et la solidarité avec les centaines de milliers de personnes touchées. Le débat sur le budget au sein du parlement et du gouvernement prend le pas sur toutes les autres questions. Les journaux télévisés sont aussi presque entièrement consacrés à la tragédie, et sur les médias sociaux, nous devons batailler contre la marée des fakenews lancées par les bolsonaristes négationnistes du climat.
De nombreuses études ont déjà montré comment un modèle économique prédateur et les politiques d’austérité du gouvernement ont laissé les territoires les plus vulnérables sans protection. La régression est énorme et il y a des coupables : les intérêts de l’agro-industrie, des compagnies minières, des banques et autres capitalistes qui ont produit la tragédie, ainsi que les politiciens qui leur sont associés.
La vague de solidarité et la nécessité d’un mouvement des personnes touchées par les inondations
On a assisté à une vague de solidarité sans précédent. Des entités, des associations, des syndicats, des associations étudiantes, des collèges privés ont ouvert leurs portes et organisé des points de collecte, des cuisines et des abris. Les réseaux de collecte de dons se sont multipliés. Les voisins ont joué le rôle de la protection civile, sauvant et secourant des personnes et des animaux.
Ce scénario contrastait avec l’hypocrisie des grands entrepreneurs et des politiciens bolsonaristes, comme Luciano Hang [grande distribution] et les députés ruralistes, qui se posent en héros, mais qui, en réalité, ont toujours nié les impacts du changement climatique et continuent de défendre un “état minimal” pour justifier le manque de préoccupation sociale et d’investissement public.
La force de cette collectivité populaire doit être le moteur d’un mouvement continu pour répondre à toutes les demandes immédiates et urgentes et se transformera en un conflit sur le processus de “reconstruction de l’État”. Des années seront nécessaires, non seulement pour reconstruire ce qui a été détruit, mais aussi pour assurer la protection future de l’ensemble de la population contre de nouveaux événements extrêmes, qui deviendront de plus en plus fréquents.
La lutte pour un logement décent et sûr, à travers une véritable réforme urbaine, ainsi que la lutte pour de meilleurs salaires, des emplois et une aide sociale efficace, doivent être au cœur des actions d’un mouvement social et populaire. Il existe des centaines d’immeubles, publiques et privées, laissés vides en fonction de la spéculation immobilière qui devraient être utilisées pour garantir un logement populaire. Heureusement, cette proposition commence déjà à circuler – y compris dans la sphère institutionnelle – comme l’une des alternatives pour faire face à la grave crise du logement que traverse l’État.
Il est temps d’en tirer les leçons et de soutenir les revendications – qui incluent l’organisation des sans-abris, le contrôle et la distribution de nourriture et de dons – afin que les nouveaux cadres de la reconstruction soient définis démocratiquement par le peuple organisé et les mouvements sociaux.
La suspension de la dette montre qu’il y a des ressources
La crise est si profonde et a tellement ébranlé un état important que la bourgeoisie elle-même est contrainte d’adopter des mesures exceptionnelles, comme le soutien à la suspension du paiement de la dette de l’état du RS au gouvernement fédéral. Avec une dette de 98 milliards de R$, l’importante mesure prise par le gouvernement Lula signifie que c’est 11 milliards de R$ qui resteront dans le Rio Grande do Sul pendant trois ans. Rien qu’en intérêts, il y aurait plus de 12 milliards de R$ si le paiement était maintenu, dépassant le montant de la dette elle-même et, par conséquent, prouvant que le paiement de la dette est au service du système financier et des prêts usuraires.
Le Rio Grande do Sul est important pour l’accumulation du capital, car il garantit une grande partie de la production de riz, des machines agricoles et des exportations de soja. La bourgeoisie ne pouvait pas l’abandonner et le voir se transformer en théâtre de révoltes, ni ignorer le rôle du Rio Grande do Sul dans la chaîne de production nationale et se voir contrainte d’accepter des mesures exceptionnelles, comme l’octroi d’une aide d’urgence de 5 000 R$ aux familles touchées.
L’État souffrira d’un appauvrissement et pourrait connaître un recul social important pendant la période de reconstruction. Pour faire face à cette situation, la lutte pour savoir qui doit payer la facture sera rude, car cette facture doit être payée par ceux qui accumulent les richesses et qui sont les moins touchés. La suspension du paiement de la dette a montré que la pression populaire peut remporter des victoires matérielles et doit continuer à garantir l’accès de l’ensemble de la population à tous les moyens nécessaires pour reconstruire l’infrastructure de l’État et la vie des familles touchées.
Cela entraînera d’énormes discussions programmatiques impliquant précisément la question du programme environnemental, de la lutte écologique, de la lutte contre le négationnisme climatique.
Construire le mouvement des personnes touchées par l’inondation de 2024
Les demandes sont nombreuses. La première, immédiate, est celle d’un abri, et la demande centrale est celle d’un logement garanti. Mais il y a aussi des demandes d’une aide d’urgence, de crédit, d’annulation des dettes et de suspension du paiement des impôts. Ces demandes sont si importantes qu’elles ont conduit à la mesure exceptionnelle de la suspension du paiement de la dette de l’Etat du RS envers le gouvernement fédéral et à la création par le gouvernement fédéral du ministère de la reconstruction.
Pour répondre à tant de demandes, il faut une organisation. Une organisation qui s’attelle à construire un mouvement, à centraliser les négociations, à contrôler le pouvoir public et à contrôler la mise en œuvre des mesures annoncées. Nous ne pouvons pas nous contenter d’attendre les gouvernements, nous avons besoin que la société (en particulier les travailleurs des campagnes et des villes, les jeunes et les pauvres) se mobilise et s’organise pour défendre ses droits et ses intérêts.